Permis de construire refusé même en contredisant un PPR

Un particulier souhaitait construire sur une parcelle en bordure d’un « important massif forestier ». Le maire a refusé ce permis de construire. Pourtant le Plan de prévention des risques (PPR) n’interdisait pas la construction. Le Conseil d’Etat vient de donner raison au maire.

Permis de construire refusé même en contredisant un PPR

Il peut y avoir un permis de construire refusé même en contredisant un PPR ! Ainsi le Conseil d’Etat vient de rejeter le pourvoi d’un administré tendant à annuler l’arrêté d’un maire refusant de lui délivrer un permis de construire pour une maison d’habitation et une piscine. Le refus était fondé sur les risques élevés d’incendie de forêt dans le secteur concerné. Cela avait conduit le service d’incendie et de secours à rendre un avis défavorable sur le projet.

Article R111-2 du code de l’urbanisme

Ainsi pour motiver sa décision, le Conseil d’État se fonde sur l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme. Celui-ci dispose que « Le projet peut être refusé ou n’être accepté que sous réserve de l’observation de prescriptions spéciales s’il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d’autres installations ». Cet article permet d’intégrer directement les risques naturels dans le permis de construire par l’application du règlement national d’urbanisme (RNU). Il oblige les maires à prendre en compte les risques auxquels est exposée la construction à venir. Dès lors, l’article R. 111-2 permet de combler l’absence d’un plan de prévention des risques (PPR).

Ainsi, la mise en œuvre de l’article R111-2 peut faire obstacle au caractère constructible d’une parcelle classée constructible. La jurisprudence de principe impose ainsi à l’instructeur du permis de construire (le maire), même en présence d’un PPR, de s’interroger sur la nécessité d’assortir le cas échéant les prescriptions générales de ce PPR de précisions d’application (spéciales), voire de refus du permis (comme en l’espèce), en application de l’article R111-2.

Des précédents existent

Le Conseil d’Etat a déjà eu l’occasion de valider un permis de construire refusé même en contredisant un PPR qui pourtant n’aurait pas classé ce projet en zone à risque (CE, 15 février 2016, Nessman, n°389103 ; 11 mai 2011, Commune de Fondettes, 321357). Un maire qui accorderait un permis de construire – ou ne le soumettrait pas à des prescriptions spéciales dans une zone à risque dont il avait connaissance – commet une faute de nature à engager la responsabilité de la commune. Cela a été le cas dans des situations similaires à celle de la tempête Xynthia.

Malgré l’applicabilité d’un PPR sur la commune de Tanneron qui ne classe pas le projet litigieux en zone à risque, le maire a refusé le permis de construire « eu égard aux risques particulièrement élevés que présentait le projet du fait de sa situation au bord d’un plateau dominant un très important massif forestier ». L’analyse faite par l’autorité d’urbanisme est telle qu’elle peut pallier les manques du plan de prévention des risques. En effet, ces dispositifs se combinent, se complètent voir se suppléent. Cette faculté de suppléer les carences éventuelles ou les imprécisions des documents de prévision des risques est la conséquence de la marge d’incertitude que la délimitation d’un tel document comporte.

Appréciation concrète par le maire

Ainsi, l’arrêt renvoie à la règle générale de l’obligation pour l’autorité publique de tenir compte du risque naturel. Ceci à la fois dans les documents d’urbanisme et les autorisations d’urbanisme. Le refus de permis de construire, même si en contradiction avec le document consacré aux risques est justifié par l’appréciation concrète faite par le maire de la situation. Elle est soumise à l’appréciation souveraine des juges du fond. Et ce alors même que les risques de feux de forêt étaient les mêmes que lors de l’élaboration du PPR.

Thibault SOLEILHAC  Docteur en droit – Avocat associé

Lire l’arrêt. CE, 6e et 5e Chambres réunies, 26 juin 2019, n°412421)

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